Les 'Barbéchas' : Moins de 20 dinars par jour, zéro protection...
Les "barbéchas", ces récupérateurs de déchets qui arpentent, chaque jour, les rues et les décharges, jouent un rôle central dans la lutte contre la pollution et le changement climatique. Pourtant, malgré l’importance écologique de leur activité, ils restent une frange marginalisée et vulnérable du tissu socio-économique tunisien.
C’est ce qu’a souligné Sofiène Jaballah, sociologue et coordinateur de l’étude "Les barbéchas ou l’économie des déchets en Tunisie, du dépotoir de Borj Chakir aux rues de la capitale", lors de son passage dans l’émission Midi Show, ce vendredi.
Travaillant dans l’économie informelle, les barbéchas gagnent en moyenne entre 15 et 20 dinars par jour, après prélèvements. Ils ne bénéficient d’aucune protection sociale ni contrat de travail, les exposant à des risques sanitaires et psychologiques élevés, en plus d’un exclusion structurelle par les politiques publiques.
Selon Jaballah, la montée en puissance de ce phénomène s’explique en partie par l’exode rural et les déséquilibres du développement régional. Il pointe, également, la responsabilité de l’État, qui crée ces dynamiques sociales par ses politiques mais ne met en place aucun dispositif d’encadrement ou de protection pour les barbéchas.
Il dénonce, également, le monopole exercé par des cartels sur la gestion des déchets, notamment autour de la décharge de Borj Chakir, qui génère d’importants profits pour quelques acteurs, tandis que les barbéchas y travaillent dans des conditions extrêmes.
Jaballah rappelle que dans de nombreux pays, les déchets sont considérés comme une richesse, alors qu’en Tunisie, ils restent traités comme une charge. Pourtant, les barbéchas sont des acteurs environnementaux de première ligne, contribuant à la réduction des déchets et à la protection du climat.
Aussi appelle-t-il à repenser le modèle économique tunisien, en instaurant une couverture sociale et des aides spécifiques aux barbéchas et en mettant en place le tri sélectif en amont. Maintenir la situation actuelle serait, selon lui, un indicateur alarmant de la fragilité sociale du pays.